QS propose l’ajout d’un «bouclier anti-privé» dans la réforme Dubé

Alors que les parlementaires ont entrepris mercredi l’étude des 1180 articles de l’immense réforme du système de santé déposée par le ministre Christian Dubé, Québec solidaire propose trois amendements décrits comme un «bouclier anti-privé».

Le porte-parole solidaire en matière de santé, Vincent Marissal, entend soumettre ses trois suggestions à ses collègues de la Commission de la santé et des services sociaux ce mercredi à l’occasion de la reprise des travaux sur le projet de loi 15.

La future «Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace» prévoit notamment la création d’une société d’État appelée Santé Québec qui aura la responsabilité de coordonner les opérations de tout le réseau. Le ministère conservera son rôle de dicter des orientations et de déterminer les budgets.

Parmi les nombreuses critiques formulées à l’encontre de la réforme, certaines reprochent au gouvernement de la Coalition avenir Québec de vouloir accélérer la privatisation des soins de santé au détriment du système public.

De l’avis de Vincent Marissal, ce projet de loi constitue «l’attaque la plus frontale» contre le caractère public du réseau de santé.

Afin de colmater cette brèche, le député de Rosemont propose le retrait de deux articles et l’ajout d’un plan pour rapatrier dans le réseau public certains services présentement fournis par des cliniques privées.

Vincent Marissal demande d’abord de retirer les articles 485 et 506. Le premier donne le pouvoir à la future agence Santé Québec d’autoriser l’exploitation d’établissements privés offrant des services comparables à ceux déjà offerts par le réseau public. Le second décrit les types de services pouvant être offerts par un centre médical spécialisé autorisé par Santé Québec.

Le troisième point de son plan consiste à déployer une opération visant à récupérer les soins déjà prodigués par le privé. Du même coup, le réseau public pourrait rapatrier le personnel et les ressources qui ont été «siphonnées» par le privé.

D’un point de vue qui peut paraître plus philosophique, le porte-parole de la deuxième opposition veut aussi réintégrer le principe de «droit» à des soins de santé «gratuits, publics et accessibles» à l’intérieur de son troisième amendement.

«C’est majeur! En ce moment dans la loi, c’est un droit. Ce droit-là disparaît dans le projet de loi 15. Si tu ne reçois pas un service auquel tu as droit, tu as des recours. Si ce n’est plus un droit, tu n’as plus de recours», explique M. Marissal en entrevue à La Presse Canadienne.

Plus tôt en matinée, le ministre Christian Dubé a soutenu n’avoir «rien changé sur le privé dans la nouvelle loi». Il soutient n’avoir qu’amalgamé certains articles de la Loi sur les services de santé et les services sociaux actuellement en vigueur.

Le ministre a d’ailleurs déposé près d’une cinquantaine d’amendements, dont certains portant sur la place des usagers ainsi que sur «la gestion de proximité» en donnant une plus grande présence aux élus municipaux. 

M. Dubé propose notamment que «au plus quatre personnes provenant du milieu municipal du territoire desservi par l’établissement» composent chacun des futurs conseils d’établissement qui viendront remplacer les conseils d’administration des CIUSSS et CISSS.  

Par ailleurs, le ministre Dubé a dit espérer la collaboration des oppositions «pour avancer dans ce projet de loi attendu par les Québécois». Il entend toujours parvenir à son adoption l’automne prochain.

Le principe adopté

Tout juste avant le début de l’étude détaillée du projet de loi, les parlementaires ont été invités à se prononcer sur l’adoption de son principe. L’Assemblée nationale a majoritairement voté en faveur du principe du PL-15 avec un résultat de 88 contre 29. 

Les oppositions ont donc rejeté en bloc ce principe.

«Nous sommes loin d’être convaincus (que le projet de loi) améliorera l’efficacité du système et surtout qu’il améliorera la qualité des soins aux patients», a déclaré la libérale Michelle Setlakwe lors des remarques préliminaires au moment d’entreprendre l’étude détaillée.

«Aucun groupe n’est venu nous dire: « Oui, ça va être plus facile, et ça, à court terme», a-t-elle ajouté.

Son collègue André Fortin a promis d’offrir une opposition constructive, mais a émis des doutes sérieux sur la manière choisie par le ministre pour arriver à ses fins.

Selon le député de Pontiac, la réforme «ne s’attaque pas aux véritables enjeux actuels» du réseau qui sont d’abord «l’attraction et la rétention de personnel qualifié», soutient-il.

André Fortin a également cité de nombreux intervenants entendus en commission parlementaire ayant tour à tour répété que le contenu du projet de loi ne correspondait pas aux volontés exprimées par le ministre. 

Le Parti québécois a aussi fait part de ses doutes au sujet de la véritable décentralisation proposée ainsi que de craintes par rapport à la banalisation du recours au privé que démontre le gouvernement.

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