Pour une rare fois, Trudeau parle de son père lors d’un séjour au Nunavut

IQALUIT, Nunavut — Alors qu’il recule dans les sondages, le premier ministre Justin Trudeau n’est plus le coureur de tête. Loin d’Ottawa, il a passé sa dernière journée au Nunavut à la traîne d’un autre type de meute, c’est-à-dire une meute de chiens de traîneau.

M. Trudeau s’est rendu à Iqaluit pour marquer la signature d’un accord historique visant à transférer les pouvoirs au gouvernement territorial en matière de gestion des terres, de l’eau douce et des ressources.

Il a terminé le voyage en montant à bord d’un traîneau mené par une meute de huskies, accompagné du premier ministre du Nunavut, P.J. Akeeagok, et d’Aluki Kotierkm, cheffe d’une organisation territoriale qui défend les droits des Inuits.

Son plus jeune enfant, Hadrien, âgé de neuf ans, s’est joint au premier ministre. M. Trudeau a déclaré qu’il avait invité son fils à découvrir le caractère unique du Nord, ajoutant que son père, l’ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau, avait fait de même pour lui.

«C’est incroyable d’être de retour ici», a mentionné M. Trudeau avant de rencontrer M. Akeeagok à l’Assemblée législative du territoire vendredi matin.

«Je réfléchissais à (comment) mon père m’a amené ici il y a 50 ans, et au cours des 50 dernières années, j’ai vu… une formidable transformation.»

Le premier ministre Trudeau évoque rarement son défunt père en public, mais il l’a fait pas moins de trois fois au cours de son voyage à Iqaluit. 

Justin Trudeau a reconnu l’impact de ces voyages sur sa vie, affirmant à une foule de membres de la communauté rassemblés pour un festin jeudi soir qu’ils «ont contribué à façonner son amour pour le Canada». 

M. Trudeau s’était rendu au Nunavut plus tôt dans la même journée pour signer l’accord final qui prévoit qu’Ottawa transfère au gouvernement du territoire les pouvoirs relatifs à l’ensemble des terres et des eaux publiques, dans le cadre d’un processus long et sinueux connu officiellement comme le «transfert des responsabilités au Nunavut». 

Le transfert des responsabilités en matière de gestion des terres est en cours depuis 2008, lorsque le gouvernement territorial a convenu d’un protocole de négociation avec le gouvernement conservateur de l’ancien premier ministre Stephen Harper.

Après des années de négociations, le territoire a conclu un accord de principe avec le gouvernement fédéral en 2019, qui est devenu l’accord final de jeudi.

Le premier ministre Akeeagok estime que l’accord rapproche le territoire de son rêve d’autodétermination et place la prise de décisions futures concernant ses ressources naturelles, y compris tout développement futur de minéraux, désormais entièrement entre les mains du territoire – et de celles des Inuits qui y vivent.

Le premier ministre et d’autres espèrent également que l’accord créera de nouveaux emplois dans le plus jeune des trois territoires du Canada, créé seulement en 1999, et qu’il générera des revenus supplémentaires pour son économie.

Les parties ont convenu d’achever officiellement le processus de transfert au cours des trois prochaines années, pour le terminer d’ici avril 2027, et qu’Ottawa enverra des millions pour aider à diriger le transfert. 

Une série de crises sur le territoire

MM. Trudeau et Akeeagok devaient discuter des prochaines étapes de l’accord lors de leur rencontre vendredi dans un territoire confronté à une série d’autres défis et crises.

Il s’agit notamment d’une grave pénurie de logements qui a entraîné des années de surpeuplement et une hausse du coût de la vie aggravée par l’inflation. Il y aussi des problèmes d’alcoolisme et de toxicomanie et le fait que l’approvisionnement en eau est actuellement insuffisant pour faire face à la croissance de la population dans la capitale. 

Bien que M. Trudeau a mentionné jeudi que sa visite n’était pas une question de discours politiques, il n’a pas manqué l’occasion de riposter à son principal rival politique, le chef conservateur Pierre Poilievre, lors d’une conférence de presse. Il a accusé M. Poilievre de vouloir faire reculer le pays.

Mais le ton général de la visite officielle était celui de la célébration et de la mise en valeur des occasions qui s’offrent à l’avenir du territoire, ont souligné MM. Trudeau et Akeeagok. 

C’était évident vendredi alors que les deux hommes partageaient des rires à l’arrière d’un traîneau.

Ils couraient chacun à tour de rôle à côté tandis qu’une meute de chiens entraînait le groupe à travers le paysage glacial. Alors que le vent soufflait fort, un parhélie, également appelé «faux soleils» rayonnait dans le ciel. Il s’agit de l’apparition de deux répliques du soleil qui se trouvent de part et d’autre de celui-ci à l’horizontale. 

Pour couronner la visite de M. Trudeau vendredi, M. Akeeagok lui a montré un igloo qu’un groupe d’hommes inuits étaient en train de construire à l’entrée d’un parc territorial.

Il a dit au premier ministre que la façon dont la structure est construite – bloc par bloc – met en évidence l’importance de chaque élément et l’importance d’avoir une base solide.

C’est une leçon qui s’applique au nouvel accord final. M. Trudeau a été invité à l’intérieur de l’igloo pour participer à l’empaquetage d’un dernier bloc, qu’il a aidé à tailler.

«Tout est beau, a commenté le premier ministre en se dirigeant vers l’intérieur. Nous allons pouvoir travailler un peu.»