Le futur premier ministre Mark Carney annoncera vendredi un remaniement ministériel

OTTAWA — Mark Carney prêtera officiellement serment comme premier ministre et dévoilera la composition de son cabinet vendredi matin. Une équipe qui, selon une source gouvernementale, ne comprendra pas Jean-Yves Duclos.

La source, qui n’était pas autorisée à parler publiquement, a déclaré à La Presse Canadienne que M. Duclos avait été informé jeudi qu’il ne serait plus ni ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, ni lieutenant du Parti libéral au Québec.

Dans une publication sur les réseaux sociaux jeudi soir, M. Carney a déclaré qu’il mettait en place «un gouvernement qui apportera à notre pays ce dont il a le plus besoin».

Les ministres qui jouent actuellement un rôle clé dans la réponse du Canada à la guerre commerciale du président américain Donald Trump devraient faire partie du cabinet de M. Carney, notamment la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne, le ministre des Finances, Dominic LeBlanc, et le ministre de la Sécurité publique, David McGuinty.

M. Champagne a semblé confirmer certaines de ces informations par hasard lors d’une conférence de presse tenue à Washington avec M. LeBlanc jeudi soir, lorsqu’on lui a demandé si le remaniement ministériel ou les élections prévues auraient un impact sur les négociations avec les États-Unis.

«Nous resterons ministres pendant cette période, ou du moins, nous verrons demain», a-t-il répondu, provoquant l’écarquillement des yeux du ministre LeBlanc.

«Oh, oh, ouf, c’était une erreur», a plaisanté M. LeBlanc.

Le ministre Champagne a balayé d’un revers de main toute idée d’avoir enfreint le protocole concernant l’annonce anticipée des décisions du Cabinet.

«Non, non, non, il y a de fortes chances», a-t-il répondu.

Les deux ministres devaient rentrer à Ottawa jeudi soir, à temps pour l’assermentation de vendredi. Mme Joly, qui se trouve à Charlevoix pour la réunion des ministres des Affaires étrangères du G7, doit également rentrer à Ottawa avant 11 h vendredi pour conserver son poste.

M. Duclos, qui est membre du cabinet depuis 2015, sera candidat aux prochaines élections fédérales.

Dans une déclaration publiée jeudi soir, il n’a pas confirmé qu’il ne siégerait pas au Cabinet, mais a indiqué qu’il pourrait désormais consacrer «encore plus d’énergie et de temps» à son travail de député.

M. Duclos a déclaré qu’il se réjouissait de travailler avec Mark Carney et que le nouveau premier ministre avait «toute (sa) confiance et (sa) reconnaissance».

Il n’est probablement pas le seul ministre du cabinet de Justin Trudeau à ne pas être invité à la cérémonie d’assermentation de vendredi — qui se tiendra à 11 h à Rideau Hall.

Un cabinet restreint

«Je pense que des signaux se sont manifestés indiquant que le cabinet sera plus restreint», a indiqué Susan Smith, commentatrice libérale et cofondatrice de Bluesky Strategy Group.

Le dernier cabinet de Justin Trudeau comptait 37 membres, dont le premier ministre lui-même.

Une source libérale haut placée a déclaré que Karina Gould, qui a quitté son poste de leader du gouvernement à la Chambre des communes en janvier pour briguer la direction du Parti libéral, ne fera pas partie du cabinet de M. Carney.

Michael Wernick, ancien greffier du Conseil privé, a déclaré lors d’une récente entrevue qu’il s’attendait à voir plusieurs ministres porter plusieurs chapeaux, c’est-à-dire qu’ils soient responsables de plus d’un portefeuille.

Certains portefeuilles pourraient être combinés pour refléter leurs ministères respectifs.

Le ministère du Patrimoine, par exemple, compte cinq ministres responsables du patrimoine, des sports, des langues officielles, des femmes et de l’égalité des genres, ainsi que de la diversité, de l’inclusion et des personnes handicapées. Emploi et Développement social Canada compte six ministres.

Mme Smith a déclaré que les décisions rendues publiques par M. Carney vendredi enverront un signal clair quant à la direction qu’il souhaite donner au pays.

«Je pense que dans ce cas, il sera possible de signaler à la fois la stabilité et un changement de cap économique», a-t-elle indiqué.

Pendant la course à la direction, Mme Freeland a déclaré qu’elle offrirait à M. Carney le poste de ministre des Finances de son gouvernement si elle gagnait. M. Carney n’a fait aucune promesse de ce genre publiquement.

«Les deux femmes se sont acquittées très efficacement de leurs fonctions de ministre. Karina Gould est extrêmement appréciée et a été une très bonne leader parlementaire», a noté Mme Smith.

Un reportage de Radio-Canada jeudi a indiqué que le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, serait démis de ses fonctions. Il a refusé de confirmer cette information aux journalistes lors d’une conférence de presse à Montréal jeudi.

«Le premier ministre a le pouvoir de décider qui siégera ou non à son cabinet», a simplement rappelé M. Guilbeault.

M. Guilbeault a fait valoir son bilan, affirmant que le gouvernement avait réalisé des progrès historiques en matière de conservation de la nature et de lutte contre la pollution plastique.

«Je pense que nous avons véritablement changé le discours sur ces questions au Canada ces dernières années», a-t-il ajouté.

Les politiques environnementales du ministre Guilbeault et du gouvernement Trudeau étaient profondément impopulaires dans certaines régions de l’Ouest canadien. Mme Smith a soutenu que le retirer du portefeuille de l’environnement enverrait «un message fort au pays, en particulier au secteur de l’énergie – tant les énergies renouvelables que les énergies traditionnelles – : M. Carney adoptera une approche différente, plus proactive et axée sur les affaires.»

Huit ministres actuels ont déjà annoncé qu’ils ne seront pas candidats à l’occasion du prochain examen. Il s’agit notamment du ministre de la Santé, Mark Holland, de Pascale Saint-Onge (Patrimoine), Arif Virani (Justice) et Lawrence MacAulay (Agriculture).

L’agriculture a récemment pris de l’importance, alors que le président américain Donald Trump s’en prend au système canadien de gestion de l’offre dans le cadre de la guerre commerciale.

Mme Smith a fait valoir que le départ de M. MacAulay crée une ouverture pour l’ajout d’un ministre de l’Alberta, ce qui indiquerait également une différence dans l’approche de M. Carney.

Ce cabinet est presque certainement un cabinet intérimaire qui sera remplacé après les élections du printemps. M. Carney a déclaré lors de la course à la direction qu’il déclencherait probablement des élections avant le 24 mars, date prévue de la reprise des travaux parlementaires.

Gouvernement intérimaire

Lorsque la campagne électorale débutera, le gouvernement fédéral adoptera ce que l’on appelle le «mode intérimaire». Les ministres et le premier ministre conserveront leurs fonctions pendant toute la campagne.

Si les libéraux remportent les élections, M. Carney prêtera serment de nouveau. S’ils perdent, il démissionnera du poste de premier ministre et le vainqueur sera invité à former un gouvernement.

La convention garantit le maintien des fonctions essentielles du gouvernement pendant une campagne électorale.

Le cabinet peut prendre des décisions concernant la réponse aux tarifs américains pendant la campagne, par exemple. Il peut également dépenser de l’argent en vertu des lois en vigueur.

Les lignes directrices publiées par le Bureau du Conseil privé avant les élections de 2021 stipulent qu’un gouvernement intérimaire devrait, dans la mesure du possible, se limiter aux questions de routine, non partisanes, urgentes et d’intérêt public. Ses décisions doivent être réversibles par un nouveau gouvernement sans coûts ni perturbations excessifs, ou acceptées par les partis d’opposition.

La convention de transition signifie que «le gouvernement doit faire preuve de retenue pendant la période électorale».

Les ministres doivent également veiller à distinguer leurs travaux gouvernementaux des activités partisanes en campagne électorale, précise le document du BCP.

— Avec des informations de Sébastien Auger à Montréal