La profession de foi fédéraliste de Marc Tanguay

QUÉBEC — Le chef libéral Marc Tanguay ne s’en cache pas: il a pris sa carte du Parti québécois (PQ) avant même d’avoir l’âge pour voter et a appuyé la séparation du Québec en 1995. Aujourd’hui, il assure avoir fait une rupture avec son passé souverainiste alors qu’il accuse François Legault de continuer d’entretenir secrètement des velléités indépendantistes. 

Le jeune Marc Tanguay se découvre rapidement un intérêt pour la politique. En sixième année, il fait un devoir sur René Lévesque. 

Au début des années 1990, avant même d’avoir 18 ans, il appelle au PQ pour savoir comment s’impliquer. 

Sous le regard interrogateur de sa sœur Annie, il lui annonce, tout content, qu’il va devenir membre d’un parti politique. «Je me trouvais important! Et mon militantisme est parti de là», raconte celui qui est aujourd’hui chef intérimaire du Parti libéral du Québec (PLQ), en entrevue avec La Presse Canadienne. 

Après être devenu membre, il militera au sein du PQ dans la région de Québec et deviendra même président régional du Comité national des jeunes du parti. «À l’époque, les jeunes avaient beaucoup plus le réflexe d’être souverainistes qu’autre chose», se rappelle-t-il. 

Aujourd’hui chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay reçoit La Presse Canadienne dans son bureau à l’Assemblée nationale. Il veut raconter comment il est devenu souverainiste, mais aussi comment il a cheminé pour en arriver à défendre avec ferveur le Québec au sein du Canada. 

«J’allais voter ‘‘oui’’»

En 1995, Marc Tanguay a 22 ans. «Arrive le référendum et c’était clair pour moi que j’allais voter ‘‘oui’’», lance-t-il assis derrière son bureau et vêtu d’une chemise blanche, le col libéré de sa cravate. 

La victoire du ‘‘non’’ et la déclaration malheureuse de Jacques Parizeau le soir de la défaite sur «l’argent» et «des votes ethniques» lui feront reconsidérer son positionnement politique. «Les Québécois avaient dit ‘‘non’’ en 1980 et ils ont dit ‘‘non’’ en 1995.  Là tu te dis ‘‘ok, qu’est-ce qu’on fait?’’»

Dans les années suivantes, il décide de couper les ponts avec son passé indépendantiste et d’annuler sa carte de membre du PQ et du Bloc québécois. 

«J’ai appelé et j’ai dit: ‘‘non seulement je ne veux pas renouveler ma carte, mais je veux que vous rayiez mon nom des listes. Je ne veux plus rien savoir’’.» 

Et comme pour se prouver à lui-même que le divorce est total, il prend sa carte du Parti libéral du Canada (PLC) en 2001 – à l’époque de Jean Chrétien. «Fallait vous dire que j’étais décidé! » dit-il. 

Il adhère aussi au Parti libéral du Québec (PLQ) en 2006. Mais le passé de Marc Tanguay refera surface alors qu’il veut devenir président de la formation politique en 2009. «Mes adversaires à l’interne avaient dit: ‘‘faites attention, c’est un ancien du PQ’’», raconte-t-il. Un argument qui aura visiblement peu d’effet: il gagne la présidence avec 60 % des voix. 

«Je suis résolument fédéraliste»

L’entretien avec La Presse Canadienne est aussi l’occasion pour l’homme de 50 ans de refaire sa profession de foi envers le fédéralisme alors que la question de l’indépendance est revenue à l’avant-plan de l’actualité politique dans les dernières semaines. 

«Honnêtement, j’ai aucune nostalgie de cette époque. (…) Je suis entré en politique par cette porte-là et j’ai cheminé. Et aujourd’hui, ça fait 25 ans que je suis résolument fédéraliste», lance-t-il. 

Des livres sont en évidence sur le bureau de Marc Tanguay dont plusieurs portent sur l’ancien premier ministre libéral Robert Bourassa. 

Un document contraste toutefois avec les lectures du leader intérimaire du PLQ: le nouveau budget de l’an 1 produit par le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon. «On le lit», assure Marc Tanguay. 

Et bien qu’il affirme sans hésitation qu’il voterait maintenant ‘‘non’’ à un éventuel troisième référendum, le chef libéral admet qu’il est légitime pour le PQ de vouloir emprunter cette voie. «Je suis convaincu que pour une troisième fois les Québécois répondraient ‘‘non’’.»

François Legault : un indépendantiste caché

La volonté de Marc Tanguay de présenter son passage de l’indépendantisme au fédéralisme en tant que rupture est aussi une façon d’attaquer son principal adversaire, François Legault, qui n’aurait jamais fait une telle cassure, selon lui. «Moi, on ne pourra jamais me contester qu’il y a eu une coupure il y a 25 ans», soutient-il.

Cette semaine, le chef libéral a attaqué le premier ministre, affirmant qu’il n’était «aucunement crédible» en tant que Capitaine Canada.

«François Legault, tout indique qu’il est toujours souverainiste», lance Marc Tanguay en entrevue, rappelant que l’actuel premier ministre a été député péquiste avant de fonder la Coalition avenir Québec et l’instigateur d’un autre budget de l’an 1.