Des militants et la direction du PLQ s’affrontent sur le calendrier de la chefferie

DRUMMONDVILLE, Qc — Les partisans et les opposants de l’aspirant-chef potentiel Frédéric Beauchemin se sont affrontés sur le calendrier de la course à la direction du Parti libéral (PLQ) au conseil général de la formation dimanche à Drummondville.

La course et le congrès auront lieu au printemps de 2025, mais les partisans de M. Beauchemin, le seul député qui a manifesté clairement son intérêt, ont plaidé pour une course hâtive, en vain.

Le PLQ répète qu’il faut tenir la course en 2025 pour éviter à tout prix un couronnement avec un seul candidat, même si apparemment, il y aurait déjà plusieurs candidats éventuels intéressés.

M. Beauchemin est exclu du caucus des députés libéraux en raison de deux plaintes de harcèlement psychologique déposées par la présidente de l’aile jeunesse du PLQ, Élyse Moisan.

La présentation des règles de la course a rapidement tourné en débat assez vif.

«Je demande à l’équipe de M. Beauchemin un peu de respect», a lancé l’ancienne ministre et députée Lucie Charlebois, lors du débat qui a suivi la présentation des règles de la course dimanche matin.

«Laissez d’autres candidatures s’opposer!» (à celle de M. Beauchemin), a-t-elle déclaré au micro.

«Grenouillage»

«Je veux que la date (de la course) soit changée» pour 2024, a affirmé Denis Tremblay en demandant au micro un vote des quelque 400 militants rassemblés, afin de changer le calendrier choisi par le comité électoral et entériné à l’unanimité par l’exécutif du parti.

«Je suis possiblement très déçu de la tournure. Ce n’est pas notre décision. Les régions n’ont pas été écoutées, comme d’habitude. À l’intérieur du Parti libéral, il y a du grenouillage.»

Partisan de Frédéric Beauchemin, il a demandé pourquoi il avait été exclu du caucus.

«Je trouve ça très grave», a-t-il conclu. D’autres militants se sont aussi exprimés pour une course à court terme.

«Mobilisons-nous! Arrêtons de nous tirer dans les genoux, pour une fois», a rétorqué Mme Charlebois.

«Ceux qui veulent une course plus tôt, qu’ils se démerdent, qu’ils démontrent qu’ils sont capables d’attendre à 2025. Et quand arrivera l’élection générale, on va être là et on va la gagner.»

M. Beauchemin n’est pas assuré non plus de pouvoir réintégrer le caucus des élus libéraux s’il est blanchi au terme des deux enquêtes en cours pour harcèlement.

«On va attendre de lire ou d’être informé de la fin du processus avant de passer éventuellement à une prochaine étape», a déclaré, prudent, le chef intérimaire, Marc Tanguay.

«On aura l’occasion de vivre ce moment-là lorsqu’il arrivera. Et c’est une question hypothétique à laquelle je ne répondrai pas. Il y aura une réflexion et des discussions.»

Commission jeunesse

Même l’influente commission jeunesse du parti — qui pèse pour le tiers des votes des membres — est divisée entre ceux qui poussaient pour une course précoce et ceux qui favorisent une course plus tard.

«J’ai l’impression que la jeunesse libérale n’a pas été écoutée», a dit une des militantes.

Frédéric Beauchemin s’est promené tout le week-end entouré d’une horde de supporters.

«La jeunesse est derrière moi, mais il y a aussi des gens dans la trentaine», a-t-il dit en mêlée de presse en matinée, en se ralliant à la décision du parti sur le calendrier.

La direction a tenu à sa décision en affirmant qu’il serait «prématuré» de tenir un congrès à la direction au printemps compte tenu des circonstances.

Dans l’éventualité d’une course hâtive, on laisse au nouveau chef «un parti en difficulté à rebâtir», ce qui est peu tentant pour des candidats à la direction, a laissé entendre l’ex-sénateur André Pratte, qui a co-présidé un comité de relance du parti dont le rapport a été rendu public cette semaine.

«Il vaut mieux essayer de faire tout ce qui est possible pour remettre la maison en ordre et il y a beaucoup de travail à faire» avant d’élire un nouveau chef, a-t-il plaidé. Par la suite, le chef sera en bonne position pour devenir premier ministre du Québec, a-t-il poursuivi.

La course devrait durer environ cinq à six mois, suivie d’un congrès au printemps 2025 à Québec, ce qui laisserait au chef environ 18 mois avant le scrutin général de 2026.

«Il est préférable de tenir la course plus tard, afin de maximiser les chances d’avoir plusieurs candidats», notamment issus de l’extérieur du parti, a dit dans son discours le président du comité électoral, Nicolas Plourde

«Personne ne veut de couronnement, ce serait la pire des choses pour le parti.»

Le téléphone sonne

Mais le chef intérimaire, Marc Tanguay, assure que déjà plusieurs personnes sont intéressées, même si seulement M. Beauchemin ainsi que le député fédéral Joël Lightbound ont manifesté de l’intérêt à ce jour.

«Le téléphone va sonner et il a déjà commencé à sonner, et on a déjà commencé à voir des discussions informelles, a-t-il déclaré en conférence de presse à la fin du conseil général. Ils attendaient le calendrier.»

Le député André Fortin a pour sa part pris lui-même les choses en main en faisant de la prospection comme un chasseur de têtes, afin de trouver des candidatures intéressantes hors du parti.

«Il pourrait y avoir, il devrait y avoir, des candidats, un nombre important de candidats qui vont se présenter. (…) Il n’y a rien qui m’empêche et je me fais le devoir moi-même d’aller voir s’il y a des gens qui sont intéressés et de les accueillir dans la grande famille libérale.»

Rappelons que le PLQ est sans chef depuis la démission de Dominique Anglade en novembre l’an dernier, à la suite de la débâcle du parti aux élections générales de 2022.