La refonte du plan d’urbanisme fait des mécontents à Compton

COMPTON. La Municipalité de Compton va de l’avant avec la refonte de son plan d’urbanisme. Celle-ci entraînera la suspension de permis et d’autorisation de construction dans la grande majorité du périmètre urbain pour une période indéterminée, ce qui ne fait pas l’affaire de plusieurs entrepreneurs de la région.

« Présentement, on doit mettre les freins sur bien des projets, confirme Martin Massé. On perd pas mal d’argent à cause de ce règlement. »

Ce dernier, adopté lors de la séance du 12 novembre, cible les zones H-6, H-11, H-13, H-16, H-17, H-18, C-2, C-14 et P-6. M. Massé est propriétaire d’un terrain non loin d’un dépanneur, à l’entrée du village, situé justement sur l’une de ces sections. « Je n’ai pas peur de le dire. J’ai payé plus de 800 000 $ et je ne peux rien faire. Ce qui est vraiment frustrant, c’est qu’on ne sait pas comment de temps ça va durer. Je me suis fait dire qu’un plan d’urbanisme, ça peut prendre quelques mois ou même des années. C’est inacceptable », peste-t-il.

Autre point difficile à avaler pour ces entrepreneurs, c’est le manque de communication avec les autorités municipales. « On n’a jamais été interpellé et, pourtant, c’est un dossier qui nous touche, regrette Jean-David Paré. On pose des questions et on n’a pas de réponses. »

Fait à noter, après la rencontre avec le journaliste du Progrès, ces représentants du domaine de la construction ont reçu un appel de la Municipalité pour une rencontre à venir au cours des prochains jours.

À un peu moins d’un an des élections, si rien ne se règle, les entrepreneurs questionnés par Le Progrès de Coaticook estiment que ce dossier pourrait devenir un enjeu électoral. « Il en va de la croissance de notre ville et de son avenir. Il faut avoir une meilleure collaboration. Il faut que ça change », estime Mario Inkel.

LE MAIRE S’EXPLIQUE

Le maire de Compton, Jean-Pierre Charuest, comprend les doléances des entrepreneurs, mais estime que la Municipalité fait bonne route avec les décisions qu’elle a prises. « On souhaite prendre du recul pour réfléchir à notre développement, compte tenu des pressions sociales, des besoins de la communauté et des limites des infrastructures municipales », explique-t-il.

« L’impact que pourra avoir le développement de nouveaux secteurs d’habitation sur la disponibilité des services aux nouvelles familles, notamment les places en garderie et la capacité d’accueil de l’école primaire, de même que les contraintes additionnelles de circulation automobile causées par l’augmentation du nombre de voitures dans la municipalité, ont fortement influencé les membres du conseil à faire preuve de prudence dans le développement du territoire », rajoute le premier magistrat.

De nouvelles obligations vont aussi incomber à la Municipalité. Celles-ci découlent des Orientations gouvernementales en aménagement du territoire, notamment sur la réduction des impacts des changements climatiques par la réduction des îlots de chaleur, la réduction des grandes surfaces imperméables aux pluies torrentielles ainsi que le développement du transport collectif et de la mobilité réduite. « Si nous voulons répondre à tout ça, il est préférable de les intégrer dès maintenant dans notre plan d’urbanisme, avant que les nouveaux développements résidentiels ne soient lancés. »

CONFLIT D’INTÉRÊT, DISENT CERTAINS PROMOTEURS

Lors d’une rencontre avec les représentants des médias, les entrepreneurs ont aussi soulevé un point qui les dérange. « Il y a une zone exclue du règlement où il est toujours permis de construire, pour le moment, la zone H-12, précise Martin Massé. Sur celle-ci, on retrouve des terrains appartenant à un conseiller municipal [de -Compton, -Marc-André -Desrochers]. Pourquoi aurait-il le droit de construire et pas nous ? Le règlement devrait s’appliquer à l’ensemble du périmètre urbain. Ça ressemble à un conflit d’intérêts, à tout le moins, une apparence de conflit d’intérêts. »

À cette observation, le maire de Compton, Jean-Pierre Charuest, explique que la -Municipalité s’était déjà engagée à supporter un projet situé à l’intérieur de cette zone. « Par le passé, on a déposé un avis de motion pour modifier le plan de zonage pour permettre cette construction. Il faut maintenant attendre l’avis de conformité de la MRC de Coaticook. Avoir inclus cette zone dans le moratoire aurait envoyé un avis contraire. Ç’a été une décision déchirante. On a entendu la critique et on verra, en décembre, si on change d’idée et qu’on l’inclut. Il y a différentes options qui s’offrent à nous. »

« Le conseiller en question est en effet copropriétaire du terrain sur lequel le projet se déploie, confirme M. Charuest. Toutefois, il faut noter qu’il ne participe jamais aux discussions. Dès qu’on parle de développement domiciliaire à Compton, il doit se retirer. On a adopté des mécanismes pour contrôler l’information et qu’il n’ait pas accès à ces documents. Tout ça peut cependant avoir des limites. Je ne peux garantir qu’il n’ait pas eu vent d’information à notre insu. »

UNE FACTURE SALÉE

6115 $. Voilà le montant que la Municipalité de Compton facture aux entrepreneurs pour chaque nouvelle porte sur son territoire. Une somme exagérée, clament plusieurs d’entre eux. « Je n’ai aucune idée sur quoi ils se basent pour arriver à ça », lance Martin Massé, sur un ton exaspéré.

En réponse à cette question, le maire Charuest précise que l’arrivée de citoyens fera grimper la pression sur certains services, dont celui de l’usine d’épuration des eaux. Celle-ci arrive d’ailleurs à capacité. « En 2023, on a adopté un règlement. On a choisi d’imposer la majorité de la dépense aux nouveaux arrivants. Puisque ces nouveaux logements ne sont pas encore construits, on impose cette taxe lors de l’émission de permis et au lotissement des terrains. Il faut savoir que lorsque nous ferons des travaux, il va falloir que la Municipalité paie la facture au complet, qu’elle emprunte et qu’elle rembourse ce prêt. Une bonne partie de ça ne peut être imputé à l’avance. C’est donc la -Municipalité qui doit supporter tout ça pour un bout. C’est une question d’équité. »