Fête des Mères: une maman de Compton célèbre les « petites victoires » de son fils

COMPTON. Pour la fête des Mères, plusieurs mamans recevront des fleurs ou encore seront invitées au restaurant ce -week-end. Jacky Shea, elle, prendra plutôt ce temps pour « célébrer les petites victoires » de son fils Jean-Luc.

Pour comprendre la portée de son message, il faut remonter en 1989, année où le petit Jean-Luc, alors âgé de sept ans, a malheureusement été victime d’un accident. « Après une journée à l’école, à sa sortie de l’autobus, il avait été frappé par un camion, se souvient Jacky. L’impact lui a causé un traumatisme crânien sévère qui l’a plongé dans un coma pendant deux mois et demi. À son réveil, il est demeuré quelque temps à l’hôpital de Fleurimont, puis a été transféré à l’hôpital Marie-Enfant pour les enfants, du côté de Montréal. Quelques mois plus tard, après qu’on n’ait plus observé de progrès, je l’ai pris sous mon aile et je l’ai ramené à la maison. »

Après tout ce temps, son état ne s’est guère amélioré. Il ne communique que très peu et se déplace toujours en fauteuil roulant, qu’une personne doit pousser. Il serait facile de baisser les bras devant une telle situation. Ce n’est pas le cas de Jacky. « Je suis propulsée par tout l’amour que j’ai pour Jean-Luc. Tous les parents diront la même chose. C’est de l’amour inconditionnel que tu as pour tes enfants. On veut toujours tout leur donner, s’assurer qu’ils ne manquent de rien. C’est surtout vrai pour ceux qui ont des enfants avec des différences. Dans plusieurs cas, on les surprotège tellement qu’on a peur qu’ils ne leur arrivent quelque chose. Jusqu’à un certain point, on devient protecteur en plus d’être parent. »

Dans l’histoire de Jean-Luc, aujourd’hui âgé de 40 ans, il y a très certainement eu des bas, confie sa mère. Ce sont toutefois les « hauts » qu’elle désire célébrer à quelques jours de la fête des Mères. « Et ç’a d’abord débuté avec sa sortie du coma, deux mois et demi après son accident. Ç’a été le plus beau jour de ma vie. Je retrouvais mon petit garçon. Je me souviendrai toujours de cette journée. Je suis sortie à l’extérieur après avoir appris la nouvelle. C’était la première fois depuis l’accident. J’ai senti le vent sur ma peau. Le ciel n’avait jamais été aussi bleu. Je voyais plein de merveilles que je ne voyais pas avant. Ça m’a vraiment reconnectée. » 

« Il y a aussi quand Jean-Luc a commencé à réapprendre à parler, même si ce n’était que des sons. Ou encore quand il a utilisé ses ustensiles et son assiette adaptée pour la première fois. Il avait des tremblements qui le limitaient, mais il y est arrivé. Même chose pour l’ascenseur qu’on a fait poser à la maison. Il est capable de peser sur le bon bouton pour monter », énumère Mme Shea.

« Les gens qui liront ça penseront peut-être que ce sont des petites actions, peut-être même insignifiantes pour eux, mais, pour moi, ce sont des petites victoires, de vrais petits miracles. Et c’est exactement ça dont je veux me souvenir. Je veux les célébrer pour cette fête des Mères. »

UNE AIDE PRÉCIEUSE

Il aura fallu près de 30 ans avant que Jacky Shea n’accepte de l’aide pour avoir soin de son enfant. « Avant, je n’en voulais tout simplement pas. J’ai toujours été indépendante et je me disais que je n’avais besoin de personne dans la vie pour m’aider. J’approche la soixantaine et il y a des petits bobos qui commencent à sortir. »

Ce constat l’a amenée à faire appel aux services de soins à domicile. Une préposée vient donc donner un bain une fois par semaine à Jean-Luc. « J’ai accepté cette aide, car si je ne le faisais pas, j’allais nuire à Jean-Luc. Il aurait été pénalisé. On ne sait jamais ce qui peut nous arriver. Là, le réseau le connaît et il sera pris en charge si une mésaventure survient. »

« Ça m’a demandé une certaine humilité de m’ouvrir de la sorte. Je l’avais fait pendant 30 ans après tout et j’y suis arrivée. Mais quand j’y repense, je suis quand même heureuse d’avoir demandé cette aide », raconte-t-elle.

AIMER LA VIE  

Dans les serres de l’entreprise qu’elle dirige (Serres LGL de Compton), Jacky Shea croit que l’avenir continuera d’une certaine façon de lui sourire. Et c’est probablement en raison de la vision qu’elle a de la vie. « Ma mère disait toujours « fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ». Ça m’est toujours resté et c’est pour ça que j’ai toujours pris soin de mon fils. Si, un jour, je me retrouve en fauteuil roulant, j’aimerais aussi avoir les meilleurs soins possibles et qu’une personne m’aime. »

« Ç’a peut-être été un peu plus difficile au cours des derniers mois avec Jean-Luc [son cœur devient de plus en plus faible, même chose pour ses poumons, selon les derniers diagnostics du médecin], mais je veux profiter de tout ce temps avec lui. C’est la raison pourquoi il est toujours avec nous aux serres. »

« Le ciel peut parfois être gris, mais il faut savoir s’accrocher et voir un peu de positif chaque jour. C’est comme ça qu’on réussit à s’en sortir », philosophe-t-elle.