Bilan annuel de la DPJ en Estrie: les mauvais traitements psychologiques en hausse

SOCIÉTÉ. Quelque 205 cas de mauvais traitements psychologiques ont été signalés en Estrie au cours de la dernière année, ce qui représente 16 % de l’ensemble des signalements retenus au cours de cette période. C’est là un des principaux constats qui ressort du bilan annuel de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ).

Les effets dévastateurs des mauvais traitements psychologiques sont encore trop méconnus au sein de la population. Tant et si bien qu’on parle de ces mauvais traitements comme étant un mal silencieux.

Directeur de la protection de la jeunesse, Alain Trudel n’a pas caché son inquiétude en constatant que les mauvais traitements psychologiques sont en hausse de 3,6 % depuis un an seulement.

«C’est préoccupant parce que quand on parle de violence psychologique, les gens minimisent souvent les conséquences et l’impact des traitements. En fait, les gens semblent même ignorer ce que c’est qu’un mauvais traitement psychologique, mentionne d’entrée de jeu Alain Trudel. Parfois, ces mauvais traitements psychologiques ont un bien plus grand impact que les traitements physiques. Un jeune qui reçoit une claque derrière la tête en arrive généralement à comprendre pourquoi il l’a reçue, il a une idée. Il sait que c’est probablement relié à son comportement. Mais un mauvais traitement psychologique, c’est insidieux, ça perdure dans le temps, c’est fréquent. On parle bien sûr, ici, de conflits sévères, de violence conjugale qui s’échelonne sur une longue période.»

Les mauvais traitements psychologiques sont à la base d’une faible estime de soi chez les jeunes. «Ça laisse des traces sur l’estime de soi, c’est sûr, s’empresse de signifier Alain Trudel. Le jeune a l’impression qu’il n’est pas gentil, il a l’impression de ne pas être à la bonne place au bon moment. Il a toujours l’impression qu’il dérange et qu’il ne répond pas aux attentes des parents. Pour n’importe quel enfant, le premier but, c’est de faire plaisir à ses parents. En retour, il reçoit de l’affection et de la reconnaissance. C’est ça qui le nourrit dans son développement.»

Selon Alain Trudel, les parents constamment en conflit entre eux génèrent un climat de violence conjugale non souhaitable. «Ils ne sont pas centrés sur l’enfants, ils sont centrés sur eux à titre d’adultes. Ils essaient de régler leurs problèmes et oublient qu’ils ne répondent pas aux besoins de l’enfant», fait-il valoir.

La séparation des parents représente fréquemment un passage douloureux dans l’enfance des jeunes. «C’est sûr que les enfants se sentent responsables, reconnaît Alain Trudel. Peu importe l’âge qu’ils ont, ils ont l’impression de s’être comportés d’une façon telle qu’ils ont provoqué le conflit entre le père et la mère.»

Selon lui, les enfants ne devraient jamais se sentir coupables d’une quelconque façon. «À la base, ce sont des parents qui ne s’entendent pas, insiste ce dernier. Ils sont toujours en opposition par rapport à l’éducation des enfants, par rapport au mode de vie familial et par rapport aux activités. Tout est sujet à confrontations.»

Impacts

Pour l’enfant, un parcours parsemé d’embûches entraînera inévitablement de gros impacts. On parle de retard de développement, de difficultés scolaires, de troubles de comportement, de problématique de santé mentale et de toxicomanie.

«Si tu dis à ton enfant qu’il ne fera jamais rien de bon dans la vie, il va finir par le penser vraiment. Par la suite, il risque fortement de perdre ses repères», pense Alain Trudel qui invite les gens à dénoncer le silence complice. «Il ne faut jamais oublier que nos enfants d’aujourd’hui, ce sont nos adultes de demain», exprime le directeur de la DPJ.