Questions-réponses avec Patricia Gauthier

Avec le manque de personnel, il y a des craintes de fermeture des urgences de Magog et de Coaticook, pourtant rénovées à grand frais il y a quelques années à peine. Vous en pensez quoi?

«On cherche à améliorer le système de santé pour améliorer le service. Un service plus stable, en continu. Mais en même temps on cherche un service qui sera à un coût acceptable. Il faut regarder le débit de patients. Est-ce qu’on a la main d’œuvre médicale qu’on peut déplacer pour offrir un service qui est plus étendu? Est-ce que ça va décongestionner les urgences de l’Hôtel-Dieu et Fleurimont? C’est ça qu’il faut regarder.»

Êtes-vous gênée de gagner un salaire plus élevé que le premier ministre? (Patricia Gauthier a vu son salaire de 247 000 $ grimper à 293 000 $)

«Ce n’est pas moi qui fixe les salaires. C’est le gouvernement, à la lumière des responsabilités qu’on nous donne. Elles sont majeures. J’avais à diriger auparavant le CHUS avec 6000 employés, maintenant ce sera une organisation de 17 000 employés. Des entreprises avec autant d’employés au Québec, il y en a peu. J’ai donc à livrer des résultats. Sinon, je n’y serai plus. La balle est dans mon camp. Je pense que mes compétences développées dans les 40 dernières années vont me permettre d’y arriver. En Ontario, ils (les gestionnaires) ont presque le double de mon salaire. Les dg qui restent ont peut-être un salaire additionnel, mais en bout de piste, il y a une économie de 220 M $ prévue dans la réorganisation au Québec.»

Avec la nouvelle structure, doit-on craindre une perte d’investissements dans la recherche au CHUS, un établissement reconnu dans ce secteur?

«Il n’y a vraiment pas de craintes à avoir du côté de la recherche. J’ai lu le mémoire que le CHUS a déposé au ministre. On y dit que la recherche peut se dérouler sur tout le territoire et pas juste dans le CSSS-IUGS. Comment on peut améliorer les soins à partir des meilleures pratiques qui sont habituellement élaborées dans un milieu universitaire? Par exemple, dans un programme de santé mentale, on va associer l’aspect universitaire à la trajectoire du patient. Il y a beaucoup de projets de recherches. De plus en plus de spécialistes qui aiment non pas rester dans leur laboratoire ou centre de recherches, mais aller auprès des populations qu’ils veulent évaluer. On leur offre donc un plus grand territoire. On est le seul CIUSSS- CHUS au Québec et on a avantage à le démontrer. Il faudra donc être plus audacieux et avant-gardiste. Je n’ai aucun doute que c’est ce qui va se passer. C’est une opportunité sans silo. Plus on va se démarquer, plus on aura de nouvelles subventions.»

L’ex-CSSS de la Haute-Yamaska s’est démarqué, au cours des dernières années, pour sa bonne santé financière. De son côté, la Fondation du Centre hospitalier de Granby exécute la plus grande collecte de son histoire permettant que le Centre mère-enfant voit le jour et que l’unité des soins intensifs subisse une cure de jeunesse. De quelle façon seront gérés les projets de construction/amélioration au sein du CIUSSS de l’Estrie – CHUS? Est-ce que les projets déjà dans les cartons seront priorisés? Est-ce que les ex-CSSS qui étaient performants et en bonne santé financière seront privilégiés?

«On devra élaborer nos projets en fonction des besoins de la population. La notion de performance est importante. Car on ne peut pas développer un secteur qui n’est pas performant. Il faudra d’abord le rendre performant. Ce n’est pas juste de dire on a les effectifs et les gens vont se déplacer, parce que c’est là que sont les médecins. Mais si on a une bonne installation avec de bons effectifs, peut-être que le territoire adjacent pourrait aussi cheminer vers cet endroit. Il faut regarder avec la perspectif d’être le plus efficace possible. Si en plus, on a une fondation qui y croit et qui vient soutenir, c’est formidable.»

L’hôpital BMP (Brome-Missisquoi-Perkins) est reconnu comme étant une référence en matière de périnatalité et en pédiatrie, notamment avec sa certification «Amis des bébés». Est-ce qu’il pourrait jouer un rôle majeur en lien avec ce domaine sur le territoire du CIUSSS de l’Estrie – CHUS, entre autres en devenant un centre de formation ou en développant davantage cet aspect qui lui vaut tant de reconnaissance?

«L’hôpital BMP est le premier hôpital qui a été certifié «Amis des bébés», c’est un modèle et une référence au Québec. Il s’agit évidemment d’une valeur ajoutée dans le domaine pour l’Estrie. Toutefois, il faut savoir que la région se démarquait déjà dans ce secteur d’activités. Au niveau de l’allaitement: 90 % des bébés sont allaités au Service de maternité et 81 % le sont toujours au premier contact postnatal. Également, quatre autres CSSS de l’Estrie (CSSS du Val-St-François, Des Sources, de la MRC de Coaticook et de Memphrémagog) font partie des 13 CSSS au Québec dont toutes les installations sont certifiés «Amis des bébés». Les autres CSSS du territoire et le CHUS sont en démarche pour obtenir aussi cette certification. Ainsi, les forces de chacun seront mises en commun pour poursuivre les travaux aux services des enfants et des familles.»

Les deux hôpitaux (CH de Granby et Brome-Missisquoi-Perkins) conservent des ententes de services notamment avec les Centres jeunesse, le Centre montérégien de réadaptation et le CRDI de la Montérégie. A-t-on l’objectif de rapatrier ses ententes en Estrie afin d’assurer un continuum de services auprès des patients? Sinon, comment entend-on assurer le continuum de services promis par la loi 10 en ayant des patients qui sont suivis, d’un point de vue «santé», en Estrie et d’un point de vue «services sociaux», en Montérégie?

«Le souhait est d’avoir vraiment des trajectoires de services complètes au bénéfice des personnes dans le CIUSSS de l’Estrie – CHUS, et ce, tel que prescrit dans le projet de loi 10. Des analyses et des travaux sont en cours entre la Montérégie, l’Estrie et le ministère de la Santé et des Services sociaux pour que dans la prochaine année des trajectoires soient complétées. Une très grande attention sera portée aux clientèles déjà desservies pour qu’elles ne soient pas pénalisées. Certaines ententes avec la Montérégie pourraient se poursuivre dans ce cadre. Les usagers et les familles sont au cœur de la mise en œuvre des trajectoires.»

L’hôpital BMP détient de nombreuses ententes de service avec le Centre hospitalier de Granby, notamment pour les services de psychiatrie. Plusieurs patients sont référés à Granby pour bénéficier de services de 2e ligne. Entends-on maintenir le statu quo ou bien l’hôpital BMP pourrait devenir un pavillon (point de service) du Centre hospitalier de Granby?

«En principe, ces trajectoires devraient être maintenues et voire même améliorées en autant qu’on réponde aux objectifs d’accessibilité, de qualité et de continuité. Les analyses se poursuivent comme dans tout autre dossier.»